Dans les pas du peintre Millet, de Cherbourg à Barbizon
Entre classicisme et impressionnisme, Millet posa les bases d’une révolution picturale majeure. Mais qui était-il ? Quel a été son parcours ? Dans les pas du peintre Millet, de Cherbourg à Barbizon, redécouvrons quelques-unes de ses œuvres.
Millet : de Cherbourg à Barbizon, les premiers pas
La Normandie de Millet 1814-1837
Jean-François Millet naît en 1814 près de Cherbourg, dans le Cotentin, au sein d’une famille de paysans. Il travaille à la ferme jusqu’à l’âge de 20 ans. Sa famille a le goût et le respect du savoir et il reçoit une bonne éducation dans le domaine des lettres et des arts par le biais de son oncle, un curé lettré. Son père décèle chez son fils un don affirmé pour le dessin et en 1833, il l’inscrit à Cherbourg dans l’atelier du peintre Du Mouchel.
Puis, il quitte la campagne Normande, mais celle-ci restera à tout jamais dans son cœur…
Paris, où Millet devient « l’homme des bois »
À 23 ans, le jeune homme, doué, obtient une bourse et entre aux Beaux-Arts à Paris. Il mène pendant quelque temps une vie parisienne itinérante. Cependant, il ne se plaît guère en ville.
Il peint dans l’atelier de Paul Delaroche. Il se fait remarquer par son aspect sauvage et ses pairs le surnomment « l’homme des bois ».
Durant ses années d’études à Paris, Millet revient régulièrement à Cherbourg. Il se rend, fréquemment, à la librairie de la ville et il y rencontre Pauline Virginie Ono, fille d’un couple de commerçants aisés. Il l’épouse, alors âgé de 27 ans. Sa femme, de santé fragile, décède 3 ans plus tard. Très éprouvé, Millet rentre à Cherbourg qu’il quitte définitivement en 1845, avec Catherine Lemaire, une servante devenue sa compagne et qui ne le quittera jamais. Ils s’installent à Paris en décembre 1845.
Il peint dans un premier temps, dans le style académique. Il se plie aux règles de l’Académie des beaux-arts en privilégiant la peinture de scènes pastorales ou historiques, thématiques présentées comme plus nobles. Il peint également des portraits pour des particuliers, le paysage, la nature morte et les scènes de genre sont considérés comme moins importants pour cette époque artistique.
1849, l’épidémie de choléra frappe Paris. À 35 ans, le peintre fuit la capitale pour Barbizon.
Millet de Paris à Barbizon
Millet, Catherine Lemaire et leurs enfants partent chercher refuge près de la forêt de Fontainebleau, à Barbizon.
Il y restera jusqu’à la fin de sa vie et c’est ici qu’il peindra l’essentiel de son œuvre.
Ce hameau lui évoque son village natal. Le lieu accueille de nombreux peintres réunis sous le nom d’« École de Barbizon » depuis les années 1820. Ils se concentrent sur la peinture de paysages et se démarquent du style académique.
À Barbizon, Millet peint alors des scènes paysannes. Cette thématique n’apparaît dans son œuvre qu’à partir de 1849, date à laquelle il s’installe à l’orée de la forêt de Fontainebleau. Millet, devient le peintre de la vie rustique, des traditions agraires, sous l’influence du réalisme. C’est à Barbizon qu’il est devenu le peintre qu’il voulait être, le peintre paysan.
Son œuvre est perçue comme annonciatrice de l’Impressionnisme. En effet, dans ses tableaux, Millet s’applique à peindre le plein-air et représente le caractère éphémère de la lumière ainsi que ses effets sur les couleurs et les formes.
Ses œuvres inspirent notamment Van Gogh. Le jeune Hollandais voue une grande admiration à son travail et reproduit, à sa façon, la majorité de ses scènes rurales.
Lorsqu’en 1880, Van Gogh décide d’abandonner la théologie pour embrasser une carrière d’artiste, il débute son apprentissage en reproduisant des dessins de Millet illustrant les travaux des champs. Une sorte de communion spirituelle lie ces 2 artistes, bien qu’ils ne se soient jamais rencontrés.
“Pour moi, c’est Millet, le peintre essentiellement moderne, grâce auquel l’horizon s’est ouvert devant nous”.
Vincent Van Gogh (source bibliographique en fin d’article)
Millet aux sources d’une polémique politique
L’Angélus, peint en 1859, a déclenché une véritable tempête médiatique. La toile devient bientôt l’enjeu d’une bruyante bataille.
Commandée à l’origine par le collectionneur Thomas Gold Appleton, un écrivain américain, celui-ci refuse de l’acquérir une fois terminée. Ce tableau est donc acheté par Alfred Feydeau, un collectionneur français, puis et change de propriétaire à de nombreuses reprises. En 1889, le Louvre, ainsi que les Etats-Unis, proposent de l’acheter, lors d’une vente aux enchères. Son prix va progressivement battre tous les records de l’époque : 553 000 francs !
C’est alors un vaste débat politique qui s’engage au sein du gouvernement français, divisé : la droite royaliste s’oppose à l’acquisition de ce tableau. Pour elle, « L’Angélus » porte un message politique dangereux, celui de 2 paysans en prière à côté de leur maigre récolte symbolisant le petit peuple pauvre et laborieux. D’autres encore, au sein même du gouvernement, ne veulent tout simplement pas que le tableau parte à New York. Faute de consensus, la toile est finalement achetée par l’American Art Association. Elle sera revendue, plus tard, à un collectionneur français, Alfred Chauchard, qui la lèguera au Louvre en 1909.
Millet s’éteint à Barbizon en 1875. La maison dans laquelle il vivait est devenue un musée. Jean-François Millet, de Cherbourg à Barbizon, n’oublia jamais ses racines et son âme : fils de paysan devenu peintre initiateur de la révolution picturale impressionniste, il rendit sans cesse hommage aux gens de la terre.
Musée :
Musée Millet 27 grande rue. 77630 – Barbizon
Horaires : 10h00-12h30 et 14h00-18h00 (lundi jusqu’à 17h30)
Fermeture : mardi d’avril à octobre ; mardi et mercredi de novembre à mars
Visite libre : 5 € ;
Tarif réduit : 4 € pour 4-12 ans
Sources :
- Jean-François Millet, le sel de la terre, éd. Le Monde, 2017 ;
- Wikipédia (images)
Remerciements : article rédigé par Sabine Haas, rédactrice web SEO