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Forteresse Royale de Chinon : Revivre le Moyen Âge

On ne l’appelle pas forteresse royale de Chinon pour rien : ce château a tout du rempart médiéval contre l’ennemi. Installée sur un surplomb, ceinturée de tours et d’un mur gigantesque, la masse de pierre claire n’invite pas au défi perdu d’avance. Entre ses murs, de hauts personnages se sont succédés : Henri II Plantagenêt, Jacques de Molay – grand maître du Temple, Charles VII, Jeanne d’Arc, Prosper Mérimée. Castrum dès l’époque gallo-romaine, Chinon est passé de bâtisse modeste à fortin imprenable en quelques siècles. Aujourd’hui, la forteresse royale de Chinon renaît pour le plus grand plaisir des visiteurs.

Visiter la forteresse royale de Chinon : une scénographie pour revivre le passé

Jusque dans les années 2000, la forteresse royale de Chinon tombait franchement en ruines… Le conseil départemental d’Indre-et-Loire a fait l’effort d’investir dans son rachat et sa restauration. Il y a eu, et il reste, beaucoup à faire. Mais aujourd’hui, le château en ouvert aux visiteurs. On peut dire que les moyens ont été mobilisés pour transformer le site en bijou touristique et historique.

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De loin, c’est un navire, un mastodonte effilé, tout en tours grimpant au cieux et en hautes murailles. Dès que l’on approche du pont en pierres pour traverser l’enceinte du château, on est saisi par l’entrée monumentale, en arc de cercle et la plaque solennelle « Château de Chinon ». Quelques pas plus avant, l’accueil est solennel : seule rescapée des ravages du temps, une cheminée paraît flotter au-dessus du visiteur. Elle surplombe les passants, fait face aux éléments.

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Cheminée de la grande salle qui aurait accueilli Jeanne d’Arc à son arrivée

En dehors de bâtiments récents qui structurent l’activité touristique de la forteresse royale de Chinon, les visiteurs peuvent profiter d’expositions temporaires mais surtout de salles d’exposition permanente qui en jettent !

Visite en toute autonomie de Château Chinon

Les logis royaux restaurés d’une charpente et d’un toit, meublés de copies créées tout spécialement par des artisans d’art. La chambre de Charles VII comme s’il allait surgir et vous accorder audience. Une scénographie particulièrement réussie avec effets de sons et d’images projetées sur la pierre nue pour nous conter l’histoire de la forteresse mais aussi celle de sa plus grande célébrité : Jeanne d’Arc. Une exposition d’objets liés à la Pucelle d’Orléans (statues, livres anciens, faïences, etc.) qui décryptent sa légende à travers les siècles.

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Statuette représentant Jeanne d’Arc dans les salles d’exposition permanentes de la forteresse de Chinon

La tour de l’horloge permet au visiteur d’apprécier un mécanisme du 14e siècle et même d’interagir avec !

En 2021, la pandémie n’a pas arrêté les efforts du département qui a pu ouvrir une nouvelle pièce restaurée. Bien que trahissant un petit arrangement avec l’Histoire (l’originale n’était pas installée dans le même bâtiment de la forteresse royale de Chinon), la chambre d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II Plantagenêt dévoile ses secrets.

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Escapade ludique dans la forteresse royale de Chinon avec l’Escape Game

Une tablette vous accompagne déjà dans votre visite seul ou famille. Elle peut aussi être l’outil idéal pour découvrir la forteresse de Chinon sous un tout autre jour. Un jeu a été créé pour plonger les visiteurs dans une aventure médiévale saisissante de 90 minutes. Il s’agit de résoudre un mystère, celui de Templiers qui auraient été emprisonnés dans les entrailles du château au 14e siècle. On visite des lieux inédits, on s’amuse entre amis ou en famille dans une quête de vérité pleine d’énigmes et de secrets inavoués !

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Visiter la ville de Chinon : un saut dans le temps (pendant qu’on y est)

Si vous n’avez jamais visité de ville médiévale, c’est l’occasion ou jamais ! La cité de Chinon a le charme suranné des temps anciens. Ses rues sont pavées de dalles claires, ses hôtels particuliers, ses habitats à pans de bois et magasins sont de vraies extensions médiévales de la forteresse. Vous doutez ? Jetez un œil sur la librairie de livres anciens, proche du musée Rabelais ! Chaque rue, ruelle, recoin, détour du promeneur mène à une façade ornée, des boiseries sculptées, des fenêtres d’un autre temps. Une simple balade permet une immersion atypique qui prolonge l’aventure du château, aidée par une signalétique riche en détails. Et pour les gourmands de patrimoine, il y a aussi :

  • le musée du Carroi ;
  • la collégiale Saint-Mexme ;
  • le musée Rabelais ;
  • la chapelle Sainte-Radegonde ;
  • les églises Saint-Etienne et Saint-Maurice.

Le roi de France à Chinon : la fin approche pour la Guerre de Cent Ans

Avant de devenir le refuge d’un roi déshérité par un père devenu fou, la forteresse de Chinon fut bâtie, sans cesse agrandie et fortifiée par différents occupants. Il faut dire que sa situation surélevée en faisait un lieu idéal pour cacher les richesses des rois. Mérovingiens et Carolingiens y stockaient leurs trésors, loin des appétits vikings… Plus tard, Henri II Plantagenêt, fuyant à la fois Philippe Auguste, Richard Cœur de Lion et d’autres héritiers reniés, s’y installa pour y mourir. Ce fut ensuite au tour de Philippe IV le Bel d’y enfermer Jacques de Molay, grand maître des Templiers pour s’assurer de la complicité du Pape Clément V dans sa croisade contre le Temple. Mais c’est au cours de la guerre de Cent Ans que la forteresse de Chinon obtint toute sa gloire.

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Petite mise au point : cette guerre dite de Cent Ans n’a pas connu d’affrontements quotidiens durant cent années. Ce conflit fut entrecoupé d’accalmies et de statu quo qu’un rien faisait voler en éclats. Aux batailles rangées, on préférait les sièges de grandes cités. Et puis, au Moyen-âge, on ne se bat pas toute l’année non plus. En hiver, le froid met à mal les hommes, le matériel, les armures, les chevaux, le terrain, bref, on reste chez soi. De même, défense de se battre quand l’Église n’est pas d’accord. La Trêve de Dieu et la Paix de Dieu, deux dispositifs visant à limiter la violence en Occident, ont priorité sur toute velléité. Tout contrevenant s’expose aux châtiments de l’Église tel que l’excommunication. Les rois d’Europe étant désignés par droit divin, difficile de se mettre à dos son envoyé sur Terre et l’ensemble de son institution. Sans oublier qu’un roi chassé du sein de l’Église expose son peuple entier au courroux des représentants de Dieu…

À présent, remontons un peu le temps… Lorsque Jeanne d’Arc et Louis VII se rencontrent dans la forteresse royale de Chinon, cela fait déjà 92 années que la guerre opposant Anglais et Français perdure. Et oui, la fameuse guerre de Cent Ans qui a si souvent résonné aux oreilles des écoliers a, officiellement, duré 116 ans : de 1337 à 1453.

Comment la Guerre de Cent a-t-elle commencé ?

Connaissez-vous les rois maudits ? En 1314, moins d’un an après avoir condamné au bûcher les derniers Templiers, le roi Philippe IV le Bel succombe. Ses trois fils règnent chacun leur tour mais, tous, meurent rapidement. Ils occupent le trône :

  • 2 ans pour Louis X ;
  • 6 ans pour Philipe V ;
  • 4 ans pour Charles IV.

C’est ainsi que l’année 1328 amorce les bases du long conflit. Des héritiers directs de Philippe IV, il ne reste que sa fille, Isabelle, mariée au roi d’Angleterre Edouard II.

Ce dernier a fait les frais d’un coup d’État auquel s’est prêtée son épouse. Emprisonné, il est mort dans le plus grand secret et dans des circonstances douteuses, pour laisser le trône à son fils, Edouard III. Il revendique rapidement le trône de France, laissé vacant. Mais ses ambitions sont stoppées nettes par le couronnement de Charles V. Le bonhomme a beau sortir d’une lignée moins directe, il est plus légitime à cette place au regard de la noblesse française que le petit fils anglais du grand Philippe IV. Il n’en fallait pas moins pour que le conflit s’embrase.

Prenant le prétexte qu’un roi de ligne direct n’a pas à s’agenouiller devant un souverain arrivé là par le hasard des morts subites, Edouard III déclare la guerre à la France. Il faut dire que la couronne d’Angleterre est puissante : elle a fait plier l’Écosse, règne sur les Flandres, l’Aquitaine, la Guyenne (actuelles régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie) et représente alors la meilleure force armée d’Europe. Bien mal en a en pris Edouard III : Charles V occupe son règne à le renvoyer dans les cordes ! Lorsque ce roi trouvé décède en 1380, les territoires pris, parfois de longue date, par les Anglais sont tous redevenus possessions de la couronne de France.

Second round : la folie de Charles VI

Le destin a un drôle de sens de l’humour.

La France voit partir Charles V plus forte que jamais depuis 1314. Hélas, son nouveau souverain engendre une reprise du conflit plus féroce encore. Souvenez-vous, Histoire Sympa vous a parlé de Charles VI, ce roi gagné par la folie. Les ducs de Bourgogne, partisans des Anglais depuis leur propre mésentente successorale au trône après la mort de Philippe IV, ne sont jamais très loin du pauvre bonhomme. Ils s’accrochent à la régence dès 1380 alors que Charles VI n’a que 12 ans. Pour lui, le dernier qui a parlé a raison et ses oreilles se prêtent volontiers aux suggestions bourguignonnes.

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Tout au long de son règne, les puissants du royaume de France se disputent l’ascendance sur lui puis la régence, d’abord en raison de son jeune âge, ensuite parce qu’il a perdu la raison. Or, les ducs de Bourgogne sont alliés des Anglais, les autres soutiennent le parti Français de la couronne tout en ayant à l’esprit leurs intérêts propres. Les assassinats derrière les portes cochères vont bon train (les fans d’un certain Trône de Fer reconnaîtront les influences qui ont inspiré son auteur) !

Le royaume sombre dans une guerre civile à laquelle se mêlent, bien entendu, les Anglais. Pour eux, les Bourguignons conquièrent Paris en 1420. Le dauphin de France, futur Charles VII, fuit la capitale pour l’Anjou et nous voilà arrivés près de Chinon. D’abord lieu de repli parmi d’autres, la ville et sa forteresse deviennent le fief du dauphin. La même année, son père le déshérite du trône qu’il promet en héritage à Henri V d’Angleterre, son gendre et arrière-petit-fils d’Edouard III. La guerre de Cent Ans est loin d’être terminée…

Dernier round : la forteresse royale de Chinon où s’enracine la légende de Jeanne d’Arc

Lorsque la Pucelle se met en route pour aller rencontrer celui qu’elle juge devoir aider à bouter les Anglais hors de France, cela fait 9 ans que Charles VII se terre en Anjou.

Échappé de Paris de justesse, il s’est déclaré roi de France à la mort de son père en 1422. Mais l’ennemi tient la ville de Reims dans laquelle tout prétendant au trône doit être officiellement sacré. C’est la coutume depuis Clovis, premier roi des Francs : seule la bénédiction des chevaliers de la sainte ampoule peut définitivement sacrer un souverain français.

Aparté : la Sainte Ampoule, trésor de l’abbaye de Reims, nous vient de Clovis. L’Histoire nous apprend que lors de son baptême, une colombe (symbole du Saint Esprit) lui aurait fait cadeau d’une fiole contenant de l’huile. Considérée comme divine, cette dernière fut utilisée pour oindre le front de Clovis fraîchement converti à la foi chrétienne. Cette fiole mi-chrétienne mi-magique fut bien sûre perdue pendant la Révolution Française, comme bien des symboles de la monarchie.

Et donc…notre Charles VII ne peut aller à Reims pour se faire sacrer dans les règles. Le 23 février 1429, une jeune fille se présente à Chinon. Une rumeur la précède car elle a déjà fait beaucoup parlé d’elle. Illettrée, paysanne, elle a pourtant réussi à convaincre le duc Charles de Lorraine et Robert de Baudricourt de lui donner un sauf-conduit et une escorte. Elle dit vouloir rencontrer le Dauphin pour lui transmettre les paroles de Dieu.

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Deux jour plus tard, Charles VII accepte de l’entretenir dans ses appartements privés. La légende dit au contraire que le soir de son arrivée, le 23 donc, elle reconnut le Dauphin, mêlé à la foule de courtisans, dans des habits très simples. Il faut dire que le bonhomme craignait une ruse en vue d’un assassinat

Jeanne séjourne plusieurs jours à Chinon, le temps de convaincre à leur tour le Dauphin, des clercs, des théologiens et autres conseillers royaux qu’elle n’est pas une illuminée. Elle dit être envoyée pour faire en sorte que le Dauphin soit sacré à Reims. Donc couronné roi de France comme il se doit. Le voyage sera long et s’il forge la légende de Jeanne d’Arc, il se termine en tragédie.

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La route vers Reims est effectivement libérée, Charles VII sacré, mais la reconquête de Paris cause la perte de la Pucelle qui est capturée par l’ennemi. Ses succès qualifiés d’actes de sorcellerie, Jeanne d’Arc est condamnée au bûcher par les Anglais et brûlée vive à Rouen.

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Entrez dans les entrailles de la forteresse royale de Chinon

Une visite à la forteresse de Chinon nous immerge dans ce Moyen âge sanglant, saccagé par une guerre des trônes sans partage qui réunit tous les ingrédients du meilleur des romans : soif de pouvoir, de richesses, conspirations, trahisons, assassinats, folie, sainte et martyre. Dans ce cadre magnifiquement restauré, partez à la conquête d’un des rares témoins du notre lointain passé et vibrez aux résonnances qui habitent encore ses pierres.

Visiter :

Site pour préparer votre visite de château Chinon

Aller plus loin en mode sympa :

  • Les Rois maudits, Maurice Druon, intégrale parue au Livre de Poche ;
  • 2 BD de la collection Ils ont fait la France, éd. Glénat | Fayard : Philippe Le Bel, Jeanne d’Arc.
  • Jeanne d’Arc, film de Luc Besson.

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